Devoir célébrer Noël loin de ses proches peut se révéler une triste expérience. Mais quand ce sont des barreaux de prison qui séparent les familles, la honte et une certaine confusion rendent l’événement singulier. Portrait.
Martin Forgues
La barrière qui sépare le pénitencier de Joliette du monde libre a été une véritable porte tournante pour Julie* durant de nombreuses années. Grande blonde, la cinquantaine tout juste entamée, elle en paraît toutefois dix ans de plus, marquée dans sa chair et dans son âme par une vie où se sont chevauchés pauvreté, drogue, criminalité et incarcération.
Assise au bout de la table dans une grande salle communautaire de la maison de transition Thérèse-Casgrain, la gorge de Julie se serre lorsqu’elle évoque le souvenir de sa fille récemment décédée d’une maladie congénitale. Participante au projet de réinsertion sociale Art Entr’elles, qui encourage les femmes à explorer leur potentiel via la création d’œuvres – photographie, peinture, écriture, « performance art » -, elle demande à la coordonnatrice si son projet peut inclure de vieilles photos de sa fille. Pour elle, l’arrivée du temps des Fêtes lui rappelle douloureusement qu’elles furent davantage séparées que réunies au fil du temps – les soins dont sa fille avait besoin rendaient les visites très compliquées, même au cours de la période des Fêtes de fin d’année.